5 Avril 2021

VENI VIDI VC #8 : "Offrir dès le tour de seed une approche smart money" (Le Club des Prophètes).

Après le succès de notre série d’articles destinés à comprendre l’impact de la crise sur les différents secteurs de la fintech, La Place Fintech souhaite aujourd’hui donner la parole aux investisseurs. « Veni Vidi VC » doit permettre aux membres de l’écosystème La Place Fintech, qu’ils soient entrepreneurs o u institutionnels, de mieux appréhender l’identité, la spécificité et les attentes des B.A. et VC français, au-delà de leur portefeuille et de leur Track-record souvent connus !


Bonjour Matthieu, pourrais-tu nous présenter l'idée qui a abouti à la création du Club des Prophètes ?
J’ai travaillé pendant 13 années en gestion de fortune, où j’accompagnais des dirigeants et entrepreneurs dans la gestion de leur patrimoine privé. Comme eux, j’ai vu les marchés financiers changer considérablement à la suite de la crise des subprimes, en devenant des marchés de flux drivés par les banques centrales. Ce nouveau monde qui laisse peu de place aux particuliers a amplifié une recherche de sens pour les épargnants, avec une volonté d’investir dans des actifs tangibles.

A côté, il y avait cette émergence des startups. Malgré ce que l’on pourrait croire, je me suis rendu compte qu’il y avait peu de passerelles entre ce monde des grands investisseurs que je suivais au quotidien, et ces jeunes pousses qui cherchaient à lever des fonds. C’est là que j’ai compris qu’il y avait une opportunité d’en créer une. En creusant un peu, je me suis aperçu qu'au-delà de l'intérêt financier d’investir dans les startups, les dirigeants de grands groupes avaient envie d’aider ces dernières en leur transmettant leur expertise ou en leur ouvrant les portes de leur réseau… Et finalement qu’il y avait peu de structures qui pouvaient répondre à leurs attentes.
J’ai donc rassemblé 4 dirigeants et entrepreneurs de renom (Dior Decupper, Johan Van Nimmen, Laurent Boillot et Vincent Mady), et ensemble nous avons dessiné les contours de ce qui allait devenir le Club des Prophètes, une communauté de dirigeants et d’entrepreneurs qui se réunissent pour investir et s’investir dans des startups en amorçage. Une véritable approche smart money.




Quelle est la différence avec les autres réseaux de Business Angels français ?
Nous sommes une communauté sélective d’investisseurs qui fonctionne essentiellement sur la recommandation et le parrainage. Il faut justifier d’une expertise forte pour entrer au sein du Club, passer des entretiens, signer une charte, s’engager sur des valeurs communes.
Nous rassemblons aujourd’hui un peu plus de 100 investisseurs, avec un objectif d’être à moyen terme 300, à travers le monde. Pas plus.
Les dossiers startups que nous sélectionnons sont toujours sponsorisés par 2 à 3 investisseurs du Club en lien avec le business de la société.
Nous investissons dans 6 à 8 startups par an pour être certain de pouvoir apporter un suivi de qualité. Toujours en impliquant des investisseurs en lien avec le business, et en s’assurant que toutes nos startups parlent au moins une fois par mois à l'un de ses investisseurs.

Quel est votre business model ?
Nous ne prenons aucun frais sur les startups, car nous ne souhaitons pas nous financer sur des jeunes business déficitaires.
Nos revenus sont assurés par nos investisseurs. Chaque membre paie une cotisation annuelle de 1000 euros, ainsi qu’une commission de 5% sur les montants investis (la cotisation étant déductible sur le premier investissement).

Quel est le profil type des membres ?
Tous sont des dirigeants ou des entrepreneurs avec des moyens financiers conséquents.
Nos tickets sont au minimum de 20.000 euros, et nous attendons de nos membres qu’ils soient, au minimum, prêts à investir ce montant chaque année. Nous vérifions bien sur ces montants représentent moins de 10% de leur patrimoine financier, en leur rappelant que les risques de perte sont réels.
Outre ce critère financier, nous recherchons, vous l’avez compris, deux catégories d'investisseurs : soit des dirigeants de grands groupes, aux parcours exemplaires, soit des entrepreneurs qui ont créé (et dans certains cas cédé) leur entreprise. Le mix de ces deux types de personnalités est intéressant : l'entrepreneur parti de rien pour monter son projet apporte son savoir-faire et son expérience, alors que le dirigeant peut ouvrir son réseau et partager sa connaissance poussée du secteur. Tous ces talents gravitent ensuite autour des startups dans lesquelles nous investissons, en mode "sparring partner".

Comment sourcez-vous les deals ?
Notre réseau est notre première source de deals, tant au niveau de nos investisseurs et des deals qu’ils peuvent recevoir que des startups du Club qui parlent de nous à leurs camarades de jeu.
Après nous faisons notre nécessaire pour être visible en intervenant régulièrement dans les incubateurs, en nouant des partenariats, en assurant des formations… Bref en battant le pavé !

Combien de startups comptez-vous aujourd'hui en portefeuille ?
Nous avons investi en presque 3 ans dans 18 startups, dont deux deals qui n’ont pas encore été annoncés. Au total, cela représente un peu plus de 10 M€. Sur ces 18 investissements, nous avons réalisé 3 seconds tours / Série A, dont Nalo - qui a connu un succès spectaculaire, et BuyBox, notre fintech toulousaine partie à la conquête de l’Europe.
Les tickets que nous investissons dans les startups sont de 250 k€ minimum, afin d'avoir une vraie part dans la levée de fonds, et montent jusqu’à 1,7 Millions pour BuyBox.

En quoi la fintech occupe-t-elle une place importante de votre stratégie d'investissement ?
La majorité de nos investisseurs nous rejoignent dans l'idée de faire des dossiers fintech, qui reste l'un des secteurs les plus dynamiques aujourd'hui. Beaucoup ont d’ailleurs des carrières d’exception dans ce secteur, et ont donc énormément à apporter à ces jeunes pousses.

Quel est le sens de votre partenariat avec la fintech Blockpulse ?
Nous utilisons la plateforme mise à disposition par Blockpulse pour gérer digitalement l'onboarding des investisseurs, notamment le KYC. Avec ce partenariat, nous avons à coeur d’offris à nos membres une expérience digitale sans aucune comparaison.
Grâce à la blockchain, la fintech permet de digitaliser les opérations d'investissement - opérations capitalistiques qui deviennent d'autant plus compliquées qu'il y a d'investisseurs. Blockpulse permet de recueillir de manière sécurisée, et en toute simplicité, les informations légales sur nos membres qui souhaiteraient investir dans une startup.
Enfin, c’est pour nous à terme une vraie possibilité d’échanger des titres entre les investisseurs de notre communauté. Je suis convaincu que Blockpulse sera une place de marché importante pour le non coté, et je veux offrir cette facilité de liquidité à nos membres.

Votre politique d'investissement a-t-elle changé avec la crise sanitaire ?
Nos choix d'investissement se sont orientés en fonction de la résilience des secteurs, touchés inégalement par la crise de la Covid. Nous investissons moins dans le tourisme ou l'hôtellerie par exemple. Toutefois, il n'y a pas eu de gel des investissements. Au contraire, nos membres ont rapidement vu que la pandémie allait générer son lot d'opportunités.

Le Club des Prophètes en deux mots ?
Du smart money en amorçage - c'est ainsi que nous aimerions être reçus par les investisseurs et par les startups. Nous sommes un fonds qui a à cœur d'accompagner les startups ; nous ne répondons pas seulement à un besoin financier.

Qu'est-ce les prophètes ont, que n'ont pas forcément les Business Angels ?
Nos investisseurs ont tous des parcours d’exception et en rejoignant le Club, il y a cette volonté forte de redonner, de transmettre. Beaucoup vous diront qu’ils ont eu de la chance, et qu’ils se sentent redevables. Le Club répond, je crois, à ce besoin.