Cantor s’installe dans le crédit Bitcoin

Publié le 3 juin 2025

La banque d’investissement américaine démarre une activité de prêts adossés à des bitcoins, avec une capacité initiale de 2 milliards de dollars.

Cantor Fitzgerald, acteur historique des marchés obligataires, a annoncé le 27 mai avoir finalisé ses premières opérations dans le cadre d’un nouveau programme de financement adossé à des bitcoins. Deux premières lignes de crédit ont été accordées aux sociétés FalconX et Maple Finance, toutes deux actives dans les services financiers liés aux actifs numériques.

FalconX, courtier crypto à destination des institutionnels, prévoit de tirer plus de 100 millions de dollars dans le cadre de ce partenariat. De son côté, Maple Finance, qui opère une plateforme de prêts on-chain, a clos la première tranche d’un accord avec Cantor. Les prêts sont garantis par des bitcoins déposés chez des dépositaires spécialisés comme Anchorage Digital et Copper.co, retenus par Cantor pour sécuriser les collatéraux.

Un marché encore instable mais en reprise

Le lancement de ce programme s’inscrit dans un contexte de redémarrage progressif du crédit crypto. Après l’effondrement de plusieurs prêteurs majeurs comme Celsius, BlockFi et Genesis en 2022, le marché avait atteint un point bas en 2023, avec seulement 17 milliards de dollars d’encours. Fin 2024, ce montant avait plus que doublé pour atteindre 36,5 milliards de dollars, selon Galaxy Research.

L’arrivée d’un acteur aussi établi que Cantor est perçue comme un tournant. Contrairement aux structures défaillantes du cycle précédent, l’établissement figure parmi les 25 primary dealers autorisés à acheter directement des titres du Trésor américain. Il gère également des opérations de collatéralisation pour l’émetteur de stablecoins Tether, ce qui lui confère une expérience reconnue dans la gestion des risques.

Un objectif de liquidité pour les détenteurs institutionnels de bitcoin

L’offre de Cantor vise principalement les institutions détenant du bitcoin qui souhaitent monétiser temporairement leurs actifs sans les vendre. En leur offrant des facilités de crédit adossées à ces réserves, la banque espère structurer un marché jusqu’ici dominé par des acteurs peu régulés.

Ce positionnement correspond à une tendance plus large observée depuis plusieurs mois : le retour de la finance traditionnelle dans l’univers crypto via des services à forte valeur ajoutée, comme le crédit structuré, le financement de trésorerie ou le trading à effet de levier. L’entrée de Cantor s’inscrit également dans une série d’initiatives parallèles, comme celles de Blockstream ou Xapo Bank, qui ont récemment annoncé des programmes similaires.

Une stratégie plus large autour du bitcoin

Le programme de prêts s’inscrit dans une dynamique stratégique plus vaste pour Cantor. En avril, la société avait annoncé la création de Twenty One Capital, un véhicule d’investissement formé avec Tether et SoftBank. L’objectif affiché : tirer parti de la demande croissante pour des produits financiers liés au bitcoin, à travers une offre professionnelle et régulée.

Ce virage intervient alors que Howard Lutnick, ancien PDG de Cantor Fitzgerald, a quitté ses fonctions pour devenir secrétaire au commerce des États-Unis. C’est son fils, Brandon Lutnick, qui pilote désormais les activités liées aux actifs numériques. Selon lui, Twenty One Capital vise à structurer l’accès des investisseurs institutionnels au bitcoin, en mettant en avant la solidité des partenaires et la maîtrise des infrastructures réglementaires.

Des risques toujours présents mais mieux encadrés

Malgré ces avancées, le secteur du prêt crypto reste perçu comme risqué par les régulateurs. La volatilité des collatéraux, les défaillances passées et l’absence de normes homogènes de gestion des risques continuent de freiner une adoption massive. Les banques centrales, en particulier, s’inquiètent de l’interconnexion croissante entre finance traditionnelle et cryptoactifs.

Cantor mise sur une approche prudente pour contourner ces écueils : structuration contractuelle rigoureuse, sélection stricte des emprunteurs, recours à des dépositaires indépendants et valorisation en temps réel des garanties. En apportant des standards professionnels à un segment encore immature, la banque espère imposer une nouvelle référence sur ce marché en reconstruction.

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