JP Morgan règle sa première transaction sur blockchain publique

Publié le 26 mai 2025

La première transaction sur blockchain publique de JP Morgan marque une étape dans la convergence entre infrastructures financières privées et réseaux décentralisés.

JP Morgan a annoncé avoir réglé une transaction sur une blockchain publique pour la première fois de son histoire. Réalisée début mai, l’opération a permis le règlement de titres tokenisés du Trésor américain émis sur Ondo Finance, une plateforme publique spécialisée dans la tokenisation d’actifs réels. La transaction s’est appuyée sur Chainlink, un protocole d’interopérabilité, pour établir une passerelle entre le système interne de la banque et les registres publics.

Cette initiative marque un tournant dans la stratégie de JP Morgan, historiquement attachée à une architecture dite en "jardin clos", reposant sur sa propre blockchain privée, autrefois baptisée JPM Coin et aujourd’hui intégrée dans la plateforme Kinexys. Jusqu’ici, les expérimentations menées par la banque restaient confinées à cet environnement contrôlé, sans interconnexion directe avec des chaînes ouvertes au public.

Des bons du Trésor tokenisés, moteur de la convergence

La transaction réalisée porte sur des bons du Trésor américains tokenisés, un type d’actif numérique qui connaît un fort essor depuis le début de l’année. Dans le cas présent, le paiement a été initié via Kinexys, puis exécuté grâce à Chainlink, qui a permis de déclencher l’achat sur le réseau public d’Ondo. Cette opération permet ainsi de faire circuler des actifs réels entre deux univers technologiques jusqu’ici disjoints.

Ce type de transaction vise à illustrer la faisabilité d’un modèle hybride dans lequel les flux financiers classiques, opérés par des institutions établies, peuvent être étendus à des chaînes ouvertes sans renoncer aux exigences de conformité et de sécurité. Selon les responsables du projet, il ne s’agit plus d’une simple preuve de concept, mais d’une structure conçue pour une mise en production.

Des ambitions alignées avec le virage réglementaire américain

Cette avancée s’inscrit dans un contexte réglementaire en mutation rapide. Depuis le début de l’année, les signaux politiques aux États-Unis sont devenus plus favorables à l’écosystème crypto. L’administration en place a notamment appelé à la création d’une réserve stratégique d’actifs numériques, et assoupli la posture de surveillance adoptée sous le mandat précédent. Plusieurs institutions financières en profitent pour accélérer leurs initiatives, à l’image de Fidelity avec son projet de stablecoin ou de Morgan Stanley, qui envisage d’ouvrir le trading crypto à ses clients E*Trade.

Pour autant, selon les responsables de Kinexys, la transaction réalisée par JP Morgan n’est pas une réaction conjoncturelle, mais l’aboutissement d’un plan stratégique amorcé plusieurs années auparavant. La structure d’interfaçage avec les blockchains publiques a été pensée de longue date, avec un objectif de déploiement opérationnel.

Des volumes déjà significatifs sur l’infrastructure privée

Avant ce saut vers les chaînes publiques, JP Morgan avait déjà enregistré une activité soutenue sur sa propre infrastructure. Selon les chiffres communiqués l’an dernier, la plateforme Kinexys traitait quotidiennement près de 2 milliards de dollars de flux, pour un total d’actifs sous-jacents en produits dérivés atteignant 1 500 milliards de dollars. Ces volumes attestent de la robustesse du système en environnement privé, mais aussi de la nécessité de l’ouvrir à des applications plus larges.

La capacité à connecter cette infrastructure à des réseaux publics ouvre la voie à une circulation des actifs plus fluide, potentiellement 24 heures sur 24, tout en réduisant les coûts de règlement et les délais de compensation.

Un écosystème en forte expansion autour des actifs réels tokenisés

La démarche de JP Morgan intervient dans un moment d’intérêt croissant pour la tokenisation d’actifs réels. D’après les données de DeFi Llama, plus de 12 milliards de dollars d’actifs réels sont aujourd’hui représentés sur les blockchains, répartis entre plus de 80 plateformes. Le fonds numérique lancé par BlackRock en mars, adossé lui aussi à des bons du Trésor, a dépassé les 3 milliards de dollars d’encours.

Ces produits attirent en priorité les investisseurs institutionnels, qui y trouvent un compromis entre rendement, liquidité et transparence. La structure expérimentée par JP Morgan pourrait servir de modèle pour d’autres établissements bancaires souhaitant offrir à leurs clients un accès aux actifs tokenisés tout en conservant les garanties des systèmes traditionnels.

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