Le projet d’euro numérique de la BCE avance : vers des tests en 2025

Publié le 23 décembre 2024

La Banque centrale européenne (BCE) a publié son deuxième rapport d’étape sur l’euro numérique, mettant en lumière des avancées techniques, des consultations publiques et des débats cruciaux, notamment sur les limites de détention.

L’euro numérique, future monnaie numérique de banque centrale, vise à offrir un moyen de paiement digital sécurisé, accessible à tous, tout en complétant l’utilisation de l’argent liquide. Selon le dernier rapport de la BCE, ce projet s’inscrit dans une double ambition : garantir la compétitivité du système financier de la zone euro et soutenir l’économie numérique européenne en fournissant une alternative fiable et largement acceptée par les consommateurs, les entreprises et les administrations.

Depuis le lancement de la phase de préparation en novembre 2023, plusieurs étapes importantes ont été franchies. La BCE a notamment révisé le "Digital Euro Rulebook", document opérationnel central qui harmonisera l’utilisation de l’euro numérique dans toute la zone euro. Elle a également lancé des appels d’offres pour sous-traiter certains composants du système, avec des réponses attendues pour 2025.

Un débat complexe autour des limites de détention
 L’un des points les plus débattus reste la définition des limites de détention d’euros numériques. Ces plafonds visent à encadrer la quantité maximale de monnaie numérique qu’un individu ou une entreprise peut détenir, afin d’éviter qu’elle ne devienne un instrument de stockage de valeur, au détriment des dépôts bancaires traditionnels.

Deux visions s’affrontent :

  • Les consommateurs : Ils souhaitent des limites élevées, pour des raisons de praticité et d’inclusion. Une association a par exemple proposé un plafond de 3 200 €, correspondant au salaire mensuel moyen dans l’Union européenne, avec la possibilité d’une augmentation progressive.
  • Les banques et institutions financières : Elles préconisent des limites plus basses, autour de 500 €, afin de réduire les risques pour la stabilité financière et d’assurer que l’euro numérique reste avant tout un moyen de paiement, et non un outil d’épargne.

Pour gérer ces limites, la BCE envisage un mécanisme dit de “cascade” : lorsque le solde dépasse la limite, l’excédent serait automatiquement transféré vers un compte bancaire classique, et inversement. Cependant, ce système est critiqué pour sa complexité et son impact potentiel sur la confidentialité des utilisateurs.

Des avancées techniques et des tests en préparation
 Le rapport met également en avant des progrès techniques significatifs. La BCE travaille sur des solutions d’intégration avec les systèmes de paiement existants, des fonctionnalités de sécurité avancées, et le développement d’un euro numérique utilisable hors ligne grâce à des technologies intégrées aux appareils mobiles.

Par ailleurs, des recherches sur les préférences des utilisateurs ont été lancées, notamment auprès des petits commerçants et des populations vulnérables, afin de garantir un design inclusif et fonctionnel. Ces travaux aboutiront à des publications en 2025 et orienteront les prochaines étapes du projet.

Prototypage et décisions à venir
 L’année 2025 sera marquée par des tests de prototypes de l’euro numérique, destinés à affiner son fonctionnement et son intégration. Ces essais permettront d’évaluer la faisabilité technique et d’ajuster les paramètres du système.

En parallèle, le cadre législatif autour de l’euro numérique progresse, bien que ralenti par les élections européennes de 2024. Le député européen Stefan Berger, rapporteur du projet avant les élections, a repris les discussions, assurant une certaine continuité.

La décision finale sur le lancement de l’euro numérique sera prise fin 2025, sous réserve de l’adoption des textes législatifs nécessaires.

Un enjeu stratégique pour l’Union européenne
 Au-delà des considérations techniques, la BCE insiste sur l’importance stratégique de l’euro numérique. Cette monnaie numérique pourrait renforcer la souveraineté monétaire de l’Union européenne face à l’émergence de solutions privées, comme les stablecoins émis par des entreprises, ou de MNBC étrangères.

En combinant sécurité, accessibilité et innovation, l’euro numérique pourrait transformer les paiements en Europe tout en assurant la stabilité du système financier. Mais sa réussite dépendra de l’équilibre entre les attentes des différents acteurs — consommateurs, banques et régulateurs — et la capacité à résoudre les défis techniques et législatifs.

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